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Heures supplémentaires : comment les démontrer et en obtenir le paiement ?

  • Photo du rédacteur: Me Le Houerou
    Me Le Houerou
  • 16 oct.
  • 4 min de lecture

Heures supplémentaires
Heures supplémentaires

Les heures supplémentaires sont un sujet explosif dans le contentieux du travail. C’est souvent le premier motif de saisine du Conseil de prud’hommes, et l’un de ceux où la préparation du dossier fait toute la différence.


Parce qu’entre la parole du salarié et les documents de l’employeur, le juge cherche d’abord la cohérence du faisceau d’indices.


Voyons comment construire cette cohérence:




1. Le cadre légal des heures supplémentaires


L’article L.3121-28 du Code du travail fixe la durée légale à 35 heures par semaine.Toute heure accomplie au-delà est une heure supplémentaire, qui ouvre droit à :


  • une majoration de salaire (25 % ou 50 % selon le volume),

  • ou un repos compensateur équivalent.


Mais dans la réalité, la difficulté n’est pas de savoir si les heures existent — c’est de les prouver.


Selon l’article L.3171-4 du Code du travail, en cas de litige :

« Le salarié présente des éléments suffisamment précis quant aux heures effectivement réalisées ; il appartient à l’employeur d’y répondre utilement. »

Ce régime probatoire est partagé, mais pas égalitaire : le salarié ouvre le débat, l’employeur doit se justifier.



2. Le principe de la preuve « suffisamment précise »


Contrairement à une idée reçue, le salarié n’a pas à prouver de manière parfaite ses heures supplémentaires. Il doit simplement présenter un ensemble d’éléments qui rendent vraisemblable sa demande.


Exemples d’éléments recevables :


  • un tableau récapitulatif hebdomadaire (même établi après coup) ;

  • des mails ou SMS professionnels envoyés tard le soir ou le week-end ;

  • des badges d’accès ou relevés de connexion ;

  • des attestations de collègues confirmant la charge de travail ;

  • ou encore des plannings officiels non respectés.


⚖️Cass. soc. 28 février 2024 n° 22-23.047 ; Cass. soc., 28 février 2024 n° 22-22.506 : un simple tableau d’horaires peut suffire à déplacer la charge de la preuve vers l’employeur.


3. Construire un faisceau d’indices cohérent


En pratique, le juge prud’homal ne compte pas les minutes. Il cherche à savoir si le volume d’heures allégué paraît crédible au regard de l’activité, des fonctions et de la charge de travail.


Stratégie :


  1. Éviter les chiffres excessifs : demander 20 heures par semaine pendant 3 ans sans preuve solide fragilise le dossier.


  2. Croiser les sources : un mail tardif seul ne vaut pas preuve, mais 10 mails + un planning + un témoignage deviennent convaincants.


  3. Rester cohérent : si le salarié a signé ses bulletins mentionnant 151,67 h sans réserve, il faudra expliquer pourquoi.


    En audience, la cohérence prime sur la quantité.



4. L’angle contentieux : comment le juge évalue la preuve


Le Conseil de prud’hommes ne « tranche » pas à partir d’une preuve unique. Il met en balance les éléments de chaque partie.


  • Si le salarié produit des éléments précis et concordants, l’employeur doit produire les siens (relevés de badge, plannings, feuilles de présence).

  • S’il ne le fait pas, le juge peut considérer les heures comme établies.

⚖️Cass. Soc. 28 septembre 2022 n° 21-13.496  : L’employeur ne peut invoquer l’absence d’autorisation préalable pour refuser le paiement d’heures imposées par la charge de travail.
⚖️Cass. Soc., 9 juillet 2025, 24-16.397  : La charge de la preuve ne peut pas reposer sur le seul salarié.


5. La démarche contentieuse


Phase amiable


Avant toute saisine, il est souvent utile d’adresser un courrier de mise en demeure à l’employeur, accompagné d’un relevé précis des heures revendiquées. Certaines entreprises préfèrent une transaction plutôt qu’un débat prud’homal risqué.


Saisine du Conseil de prud’hommes


Le salarié dispose de 3 ans pour agir (article L.3245-1 du Code du travail). Le juge :


  • examine les pièces des deux parties,

  • détermine les heures retenues,

  • ordonne le paiement + congés payés afférents + intérêts légaux.


À ne pas oublier : La condamnation peut inclure le rappel de salaire + majorations + indemnité pour travail dissimulé (si les heures ont été volontairement omises).



6. Les situations particulières: forfaits jours et cadres autonomes


Salariés au forfait-jours


Le contentieux est différent mais fréquent. Si le suivi de la charge de travail n’est pas réel et régulier, la convention de forfait est nulle, ouvrant droit au rappel d’heures supplémentaires.


Cadres autonomes


Même les cadres « autonomes » peuvent prouver des dépassements d’horaires malgré leur autonomie relative dans la gestion de leur temps de travail.



7. Conseils pratiques côté salarié


  • Tenir un relevé personnel régulier (même manuscrit).

  • Sauvegarder les preuves numériques (mails, planning Outlook, SMS).

  • Ne jamais signer un document contestable sans mentionner de réserve.

  • Consulter un avocat avant d’envoyer un courrier à l’employeur : le ton, la chronologie et les pièces jointes comptent.


En contentieux, le dossier le plus solide n’est pas celui qui a le plus de pièces, mais celui où chaque pièce raconte la même histoire.



Conclusion


Le contentieux des heures supplémentaires n’est pas un combat de chiffres, mais un débat de crédibilité.Le salarié doit raconter un temps de travail vécu, appuyé par des éléments précis et cohérents.Le juge, lui, cherche la cohérence, pas la perfection.


Un dossier bien construit permet souvent :


  • d’obtenir une négociation amiable solide,

  • ou une condamnation judiciaire significative.


Vous estimez avoir accompli des heures supplémentaires non rémunérées ?


Le cabinet accompagne les salariés dans la constitution de leur dossier probatoire et la procédure prud’homale visant à faire reconnaître leurs droits.



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